Elyens

« Le jour où je me suis aimé pour de vrai, j’ai cessé de revivre le passé et de me préoccuper de l’avenir. Aujourd’hui, je vis au présent, là où toute la vie se passe ». (Kim Mcmillen, « When I loved myself enough »).

On ne peut s’intéresser à la souffrance humaine sans se heurter à la question de l’égo. L’Ego est un oignon formé d’innombrables pelures identitaires ; chaque pelure est ajoutée aux précédentes en fonction du caractère unique qu’elle confère à une personne. C’est primitif, territorial : sous l’effet des hormones du stress, nous sommes prêts à défendre chaque pelure identitaire comme s’il en allait de notre survie. Avec des mots (jugements, blâmes, critiques) ou, de manière plus archaïque, avec les poings ou des bombes. A cause de l’attachement aux pelures ; c’est la peur de perdre ou de n’avoir jamais existé…A notre époque, le cerveau ne fait plus la différence entre la perception de ce qui menace la survie et la perception de ce qui menace l’égo ; il déclenche la même réaction : lutte, fuite ou paralysie. Dès qu’une menace se profile, apparaissent la peur, l’agressivité et tous leurs dérivés : l’anxiété, l’angoisse, la déprime, l’hostilité, la jalousie, le mépris et autres émotions qui minent l’existence humaine. Car la suppression d’une seule pelure équivaut, pour le cerveau, à la mort. Une grave erreur apparue au cours de l’évolution ; le cerveau est parfois un peu sot…aucune pelure n’est permanente ; il souffre pour rien !

Impossible de supprimer l’égo. Pour cela, il faudrait supprimer le processus d’identification. Dès la naissance, le cerveau se trompe ! Il interprète maladroitement des signaux envoyés par les parents. Il se met à croire que, pour survivre, il doit être intéressant, et il imprime cette croyance sur son disque dur. Elle conditionne par la suite ses peurs, ses réactions agressives, les comportements qu’il adopte. Le cerveau choisira toute sa vie ce qui peut lui apporter un caractère unique et il sera à l’affût de la moindre critique à l’encontre de ce qu’il a choisi. Ainsi, s’il entend une opinion qu’il juge négative, il sortira l’artillerie lourde et la dirigera vers la personne jugée désobligeante. Biologiquement, le corps réagit comme si sa survie en dépendait, prêt à tuer pour un simple commentaire.

 

La bonne nouvelle, c’est que nous ne sommes pas notre égo ; nous sommes « ce qui ne vieillit jamais  (Marie de Hennezel) ». Il s’agit de notre capacité à être présent, à aimer, à savourer, à créer, à transmettre, à apprendre, à communiquer, à s’émerveiller, à résoudre des problèmes, ainsi qu’à d’autres capacités associées au pouvoir de la présence et de l’intelligence humaine.

Le défi d’une vie consiste à découvrir la différence entre l’activité de l’égo et celle de la présence. L’enjeu est de réaliser, à chaque instant, que nous avons le pouvoir de ne pas laisser l’égo s’emparer de nos vies et accaparer toute notre attention. Il suffit d’apprendre à revenir sans cesse à la présence. Un exercice difficile, mais qui conduit au plus précieux de tous les accomplissements : savourer pleinement chaque seconde de nos courtes existences.

Il n’y a que l’être humain qui associe le sentiment d’exister à un « je » et qui a pour réflexe de penser que « si ma croyance disparait, je disparais ». Le « je » n’est pas indispensable à l’être. L’expression « s’aimer soi-même » signifie qu’il n’y a plus de « je » aux prises avec des tourments, du mépris, la peur de disparaitre ou d’être oublié.

La plus grande des dépendances, celle dont proviennent toutes les autres : la tentation permanente d’être quelqu’un. Le moyen de s’en libérer : « il ne faut pas que tu aies tout le temps envie d’être aimé ; il faut juste que tu saches que tu es tout le temps capable d’aimer. Et que tu t’en souviennes toujours.

L’égo est un personnage de bande dessinée, fait de tous ces héros qui défilent et peuplent notre tête pendant notre vie. Les personnages que l’on s’imagine devoir jouer : le fils idéal, l’amoureuse de rêve, l’institutrice géniale, le médecin magicien, la meilleure amie irremplaçable, … L’égo est à lui seul une collection de milliers de héros. Et la mémoire est le placard où sont entassés tous ses costumes. Egoman : c’est le super héros qui se cache dans nos têtes, celui qu’on voudrait être. S’il avait un animal de compagnie, ce serait un hamster de garde qui, en activant sa roue, fabriquerait des pensées inutiles dans la tête des hommes. Ce bruit répétitif, obsessionnel, mobilise toute notre attention, nous empêche d’être là, au présent, et nous prive du bonheur d’aimer et de créer. Egoman a tout le temps peur de perdre ce qu’il croit posséder.

L’égo s’offusque, l’intelligence s’indigne. L’égo se ferme, l’intelligence observe. L’égo résiste, l’intelligence écoute. L’égo se défend, l’intelligence partage. L’égo envie, l’intelligence éduque. L’égo se sent humilié, l’intelligence compatit. L’égo hait, l’intelligence aime. L’égo lance des cailloux, l’intelligence soigne les blessures.

 

Le moine Thomas Merton : « Le véritable silence, c’est lorsqu’on n’a plus besoin d’être entendu ». 

Friedrich Nietzsche : « Ce n’est pas le doute qui rend fou : c’est la certitude ».

 

L’épidémie des temps modernes, un mal qui tue plus que tous les cancres réunis : « le mal de l’égo » ; les personnes croient dur comme fer qu’elles sont ce qu’elles pensent. J’ai réalisé que j’avais fini par adopter l’urgence comme mode de vie ; je confondais les nuances et l’inefficacité, la complexité et l’inutile. Hors la profondeur requiert de la lenteur et jusque-là, je n’avais pas de temps à perdre avec ce qui demandait du temps. Sais-tu ce qui coûte cher maintenant ? C’est tout ce qui demande de la préparation, c’est-à-dire ces gestes qui ont le temps. Aujourd’hui, on croit que parler fort est synonyme de savoir, de pouvoir ; il faut donner une réponse rapidement, pleine de certitude, sinon on passe pour un incompétent. On prend la solution instantanée pour de la sagesse ; la recette a remplacé le discernement.

L’égo peut devenir le cancer de la conscience ; il fait plus que tuer : il empêche les vivants de vivre. En s’emparant de leur attention, il les empêche d’être disponibles à ce que les sens perçoivent. Le plus grave problème de l’existence humaine n’est pas de mourir, mais de ne pas apprendre à vivre.

Devenir intelligent, c’est apprendre à être « vigilant », en distinguant les pensées pleines de « moi, moi, moi » de celles qui ne le sont pas. On se demande : « En quoi cette pensée m’est-elle utile ? », et on la laisse fondre si on estime qu’elle ne l’est pas. Devenir intelligent, c’est ce que le mot « aimer » veut réellement dire.

La solution est simple, mais difficile à appliquer : ramener toute son attention sur la personne qu’on a en face de soi. Difficile à appliquer parce que l’égo veut cette attention pour lui tout seul ; sinon, il a l’impression de disparaître…

L’égo, c’est la personne qu’on pense être. Et il grossit au fur et à mesure que celui qu’on pense être croit avoir toujours raison et s’imagine supérieur aux autres. Mais celui qu’on « pense » être n’a jamais rien à voir avec ce que l’on est en réalité. Jamais !

 

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TRUC A RETENIR POUR ARRETER LES FILMS DANS NOTRE TETE : « Reviens ici ! Reviens ici ! Maintenant ! Tout de suite ! ». Et quand on revient vraiment ici, au présent, le cinéma à l’intérieur s’arrête ».

 

Auteur : Serge Marquis    

Editions: de La Martinière

Réflexion:

En effet « miroir », en quoi cette lecture pourrait-elle évoquer votre parcours et comment pensez-vous qu’elle nous inspire dans nos accompagnements de cadres & dirigeants, en OUTPLACEMENT INDIVIDUEL et EXECUTIVE COACHING ?

Au plaisir de futurs échanges …